Depuis 1955, les juniors montalbanais recevaient leur récompense par un voyage de fin de saison. En 1959, cette tradition fut encore respectée et pour la cinquième fois, les juniors vert et noir effectuèrent leur sortie pascale. En 1955, la caravane montalbanaise avait choisi Perpignan et l’Espagne. En 1956, c’était Paris avec le match France-Angleterre à Colombes et un arrêt à Montargis. En 1957, la Provence et la Côte d’Azur, les rencontres de Châteaurenard et de Nice. En 1958, la même région avait été choisie avec deux matches contre Toulon et Nice.
Pour le voyage de Pâques 1959, Edouard Tournou organisa une escapade en Suisse via Chambéry et Oyonnax. Voici le savoureux témoignage d’un juniors montalbanais anonyme.
« Nous avons pris le départ samedi 28 mars à 21 heures. Montauban désert nous a laissé partir avec indifférence. Pour une fois, tout le monde était à l’heure et, avec le maximum de confort, nous nous sommes installés dans la magnifique voiture du transporteur habituel de l’USM, M. Barrière. 50 km et les lueurs de Toulouse apparaissent. Toulouse où nous faisons un arrêt pour prendre le camarade Jean-Louis Cantoni et que nous traversons sans le moindre regret. Le seuil de Naurouze, Castelnaudary, Carcassonne et ses tours, Barbaira et ses poètes et enfin Narbonne où nous cherchons sans la trouver « la porte du garage » chère à Charles Trenet. Narbonne, ses Barques, sa cathédrale, est une belle ville et d’autant plus appréciée que nous y prenons un repas nocturne qui apaise nos estomacs affamés.
Nouveau départ. La nuit est sombre, le ciel bouché par une épaisse couverture de nuages qui nous frustrent des paysages languedocien sous le clair de lune. Mais peu à peu, le sommeil s’empare de nous et très simplement, nous confions notre destinée au chauffeur et à Saint-Christophe.
7h du matin. Les yeux bouffis de sommeil s’ouvrent avec difficulté. Ce n’est pas grave pour les jeunes, mais l faut voir le visage complètement défait des adultes à leur réveil. C’est l’arrêt à Voiron. Nous sommes dans l’Isère, dans les Alpes. Que de chemin parcouru durant notre sommeil !. Notre appétit est étonnant et ce petit déjeuner dans l’air frais et vivifiant des Alpes est un souvenir que nous ne sommes pas prêts d’oublier. Nous repartons et arrivons vers les 10h30 à Chambéry, ville splendide. Au siège su SO Chambérien, nous sommes reçus avec une extrême gentillesse puis nous allons au stade prendre une douche qui a le don d’effacer toutes nos fatigues de voyage nocturne.
Repas à midi et à 15h, nous sommes en tenue dans le magnifique stade municipal. Nous jouons de notre mieux et nous gagnons 9 à 0. Réception au siège à 18h30, repas à 20h.
Lundi matin, départ à 7h30. Un arrêt à Aix-les-Bains, une visite au lac du Bourget et nous arrivons à Oyonnax, la ville de la matière plastique. Comme la veille, réception au siège dans la matinée, mais nous jouons à 14h30, en lever de rideau d’une rencontre amicale entre Oyonnax et Grenoble. Nous rencontrons les juniors locaux et nous gagnons. Le public salue notre exhibition avec une joie et un enthousiasme qui nous étonnent. A 18h30, réception au siège où les dirigeants locaux et notamment M. Guichon, secrétaire général du club, ne savent que faire pour nous être agréables. La soirée est formidable, agrémentée d’un banquet et d’une sortie dans la d’Oyonnax. Il faut avouer que nous avons mis un peu d’ambiance et que notre corrida oragnisée de façon impeccable avec mise à mort, matadors, picadors, banderillos et toros, connut un succès qui dépassa toutes nos espérances. Le but de notre randonnée était atteint et notre rôle d’ambassadeurs pyrénéens accompli, nous avons pu savourer enfin notre voyage en touristes.
Le mardi matin, départ à 9h. Le car arriva à Genève à 11h. Un déjeuner agréable nous y attendait et notre après-midi fut consacrée à la visite de cette ville sortie d’un conte des « Mille et une nuits » avec son lac unique, son grandiose Palais des Nations et la netteté de ses avenues et de ses places.
Le lendemain mercredi, l’heure du départ était fixée à 8h. Il fallait bien repartir vers Montauban. Il nous a semblé que certains de nos accompagnateurs seraient restés quelques jours supplémentaires. Il faut dire que l’entraîneur Edouard Tournou, l’arbitre Jean Lacombe et Roger Sainvoirin qui nous avaient accompagnés, avaient été très gentiment reçus par une charmante hôtesse suisse qui était la cousine de M. Barrière. Au retour, un arrêt à Annecy et une promenade sur le lac furent les dernières étapes de notre voyage. Le retour s’effectua dans le calme ; l’enthousiasme avait fait place à la lassitude et lorsque, jeudi matin, dans la lueur blafarde du ciel montalbanais, vers les 4h, nous avons vu les tours de la cathédrale se profiler à l’horizon, notre joie était sereine. Vivre cinq jours merveilleux comme un conte de fée et se retrouver dans son pays, revoir sa famille et sentir l’air de Sapiac, sont des sentiments que nous, juniors, nous ignorions encore. Aussi, mes camarades et moi-même, remercions nos dirigeants et les généreux et anonymes donateurs et tous ceux qui ont pu contribuer à notre voyage ».
A la suite de ce voyage, le capitaine de l’USM Roger Sainvoirin signera à Oyonnax où il terminera sa carrière et sa vie.
Effectif des juniors A et B de l’U.S.M: Deltorn, Pitet, Issanchou, Siréjol, Guimounet, Théron, Darennes, Jacques Sirac, Louis, Maurice Alary, Cornil, Pécou, Bernard Aymard, Jean-Louis Cantoni, Robert Felga, Jean-Claude Montamat, Guy Darold, Favarel, Louis Chauvin, Riba, Christian Albert, Pierre Miquel, Laussac, Ginesty, Dirlés, Coustals, Battaïa, Thirion, Costes, Berchaud, Riaudo, Merlhe, Majoral, Périés, Moulis, Louis Felga, Raynal, Martin.
47 ans après, j’ai une pensée émue pour trois de ces juniors qui furent cruellement frappés par le destin. Le 8 mars 1959, l’arrière international scolaire Louis Chauvin et l’avant Michel Berchaud, sauvèrent un jeune garçon qui se noyait dans les eaux tumultueuses du Lot. Pour cet acte de bravoure, Maurice Herzog, haut commissaire à la Jeunesse et aux Sports, leur attribua une bourse de vacances pour deux semaines dans un centre de sports nautiques. Michel Berchaud perdra la vie sur une route de Montbartier en octobre 1964, tandis que Louis Chauvin nous quittera un mois avant les fêtes du centenaire de l’USM, durant l’été 2003. Ma dernière pensée va à Louis Felga, valeureux talonneur, qui quittera ce monde, fauché à 20 ans par un chauffard ivre, route de Paris à Aussonne, dans la soirée du 6 août 1960.